Elle va avoir 60 ans. Et depuis 10 ans, Léonie fréquente des hommes plus jeunes, franchement plus jeunes qu’elle. Mais n’allez pas lui dire que ce sont des « oursons ». Ils sont majeurs, vaccinés et savent très bien ce qu’ils font. Explications.
C’est à la lecture du témoignage d’Anne-Marie*, plus tôt cet hiver, que Léonie a bondi. Cette cougar de son état y relatait ses aventures coquines avec différents « oursons », un terme qui hérisse et irrite au plus haut point notre Léonie.
Lisez le témoignage d’Anne-Marie
« Ça implique que ces jeunes hommes cherchent une mère. Je trouve ça infantilisant, raconte la quinquagénaire, rencontrée dans un café de la Rive-Sud un petit vendredi matin récent. J’ai un assez bon échantillonnage, ajoute-t-elle d’un air entendu, et la majorité, ce n’est vraiment pas ça. »
Qu’est-ce que c’est, alors ? « Ce qui revient toujours, répond-elle sans se faire prier, c’est que [les femmes plus âgées], ce n’est pas compliqué ! »
On s’entend, poursuit Léonie : « Je ne suis pas là pour me marier et avoir des enfants, je suis indépendante financièrement, et puis j’ai essayé la vie de couple dans ma jeune vingtaine et… ce n’est pas pour moi ! », sourit-elle à pleines dents.
Rien ne la prédestinait pourtant à fréquenter cette jeunesse. Ses premières relations, c’est avec des gars de son âge que ça se passe. Elle se fait un premier chum au cégep, par ailleurs « très ordinaire » au lit. « Je ne peux pas dire que j’ai pris mon pied. Mon premier orgasme, je l’ai eu très tard. Je dirais : début cinquantaine. » Avec un homme plus jeune, devine-t-on. Et on devine juste. Nous y reviendrons.
Suivent ensuite quelques histoires de durée variable, une première plus épanouissante – « il était plus attentif, plus soucieux du plaisir de sa partenaire, ce n’était pas toujours gagnant, mais déjà là, c’était mieux ! » – une autre moins. « La seule chose qui était le fun avec celui-là, c’était aller danser ! »
Toujours est-il qu’autour de 30 ans, Léonie se retrouve enceinte, d’une énième relation, moyennement intéressante. Le père ne reste pas dans le portrait et elle élève seule son bébé. Et s’y consacre, comme on dit, corps et âme. « Et puis, zéro, je n’ai eu personne pendant 20 ans. » Rien ? « J’étais focalisée sur ma vie de mère », décrète-t-elle.
Ça ne s’invente pas : c’est carrément son enfant, devenu adulte, qui a fini par la secouer : « Mère ! Ça ne te tenterait pas, dater ? » C’était il y a plus ou moins 10 ans. « Ah ouain ? Tu penses ? »
Léonie s’inscrit alors sur des applis, et cherche tout naturellement des hommes de son âge. « Mais ceux que j’ai rencontrés, c’est toujours le même pattern, déplore-t-elle. Ils veulent se caser ! Mais moi, je ne veux pas ! » Elle est fort bien toute seule, et ne veut surtout pas un homme sous son toit. « Et puis l’attirance n’était pas là… »
On me dit que je ne fais pas mon âge. Mais eux ? Ils ne font pas leur âge dans le sens inverse !
Léonie, fin cinquantaine
Alors, que fait Léonie ? Elle élargit son champ de recherche. « Et j’ai mis la barre à 30 ans, en me disant : on verra. » Et puis ? « C’est hallucinant, enchaîne-t-elle. Ça a été un grand succès, c’est impressionnant. » Elle n’en revient pas. « Moi, je ne bullshite pas. Je dis mon âge. Je n’ai pas de filtre. Et les gars sont très intéressés. Très, très, très intéressés ! »
Elle en rencontre comme ça des dizaines. Se fait des amis. Plusieurs amants. Même un amoureux ou deux. Et des fréquentations en série. « Pour la majorité, ils sont très honnêtes, dit-elle, ils ne veulent pas de relation. Ils veulent baiser. »
D’ailleurs, elle classe ces jeunes hommes (entre 30 et 45 ans) en deux catégories : « ceux qui prennent et ceux qui donnent ».
Les premiers « prennent parce qu’ils ne savent pas donner. Et le problème, c’est qu’ils regardent de la porno, et ont une conception très limitée de comment marche le corps d’une femme. C’est zéro satisfaisant ». Combien sont-ils ? « Une majorité, estime-t-elle, je dirais 80 %. » On comprendra qu’elle ne perd pas trop de temps avec eux.
Dans la deuxième catégorie, qu’elle estime à 20 %, Léonie place un jeune amant qu’elle a fréquenté une bonne année, carrément tombé amoureux d’elle, qu’elle a fini par laisser parce qu’elle ne l’aimait pas comme ça. « C’était un gars sans expérience, mais il voulait apprendre. Un gars motivé ! » C’est d’ailleurs avec lui qu’elle a eu son premier orgasme, se découvrant même fontaine. « Ça a été une révélation, dit-elle. Ben voyons ! Mais je pense que j’ai mieux exprimé aussi ce qui marche ou pas », avance-t-elle.
Autre exemple de ces hommes « donneurs » : le jeune qu’elle fréquente actuellement, début trentaine toujours.
Lui, il veut prendre soin de toi, il prend son temps, il veut tellement que tu sois bien ! Et j’ai aussi exprimé ce qui marchait pour moi.
Léonie, fin cinquantaine
Une communication gagnante, de toute évidence.
Léonie ne le cache pas : les jeunes hommes l’attirent davantage, physiquement parlant : « Ils sont beaux, jeunes, fringants ! Ils ont une drive qui me convient ! » Même s’ils ne sont pas au même endroit dans la vie – « ils s’enlignent dans leur vie, moi je suis en préretraite ! » –, « c’est cool ! », assure-t-elle. « C’est rafraîchissant ! Plus que de me faire parler de REER, mettons ! », éclate-t-elle de rire.
Elle ne met pas une croix sur les hommes de son âge, mais « il faudrait une réciprocité », avance-t-elle. En attendant, elle se contente de ce qui passe, même si elle sait très bien que c’est sans doute sans avenir (« probablement qu’ils vont vouloir des enfants ! ») et s’en porte très bien, merci. « Ce sont des adultes, répète-t-elle. S’ils préfèrent les femmes plus âgées, c’est peut-être parce qu’ils n’ont pas envie de se prendre la tête avec des critères inatteignables [des filles de leur âge]. Et puis… ils aiment le fait que je sois plus expérimentée ! »
Elle réfléchit tout haut et conclut : « Peut-être qu’on est plus à l’aise avec notre corps, malgré tous nos défauts ? C’est fascinant, écoute, j’ai du gras, des vergetures, mais… ils s’en fichent ! »
Visiblement : Léonie s’en fiche aussi.
* Prénoms fictifs, pour protéger leur anonymat.
Auteur : Silvia Galipeau
Aller à la source